— Allo?
— Maman ?
— Damien, c’est toi ? c’est à cette heure-ci que tu m’appelles ? il est minuit, je dors.. qu’est-ce qu’il y a ? tu as eu un accident ? on doit venir te chercher ? où es-tu ?
— Maman, tais toi !
— M’enfin Damien, comment oses-tu me parler ? je suis ta mère !
(silence)
— Damien, tu es encore là ?
— Je n’aurais pas dû appeler, je suis désolé de t’avoir réveillée.
— qu’est-ce qu’il y a Damien ?
— Maman, je suis désolée.. je vais bientôt te rejoindre.. j’avais espéré que..
— Me rejoindre ? comment ça me rejoindre . mais ce n’est pas possible, tu le sais bien.
(silence)
— Damien ? .. a-t-on idée de réveiller les gens à cette heure, maugréa-t-elle pour elle-même. Allez mon chéri, va dormir. Tu viendras me voir à la Toussaint, comme d’habitude. J’aime bien quand tu apportes des fleurs.
— Maman, je suis à l'hôpital..
— Tu es à l'hôpital ? rien de grave j’espère ! on te soigne bien ? tu sors bientôt ?
(silence)
— Maman, pour une fois, veux-tu te taire ? même là-bas tu n’as pas appris à te taire et à écouter ! c’est désespérant !
— M’enfin ! répondit-elle outrée
— Tais-toi maman ! laisse-moi parler !
il reprit son souffle et poursuivit :
— Nous avons eu un accident de voiture. Il faisait nuit et la route était glissante. J’ai voulu éviter un cycliste qui venait de droite et la voiture a dérapé contre un arbre.
— Mon dieu, Damien, que me racontes-tu ! d’où venait ce cycliste ? tu l’as heurté ? il est mort ? blessé ?
(silence)
— Je ne sais pas pour le cycliste. Nous avons été transporté aux urgences. Maman, nous allons tous les trois vous rejoindre, papa et toi. Le choc a été terrible.
— Oh tu sais, ton père est parti depuis longtemps. Ils sont venus le chercher “pour un monde meilleur” m’a-t-il dit ! c’est pas si terrible ici, tu sais ! si tu peux ne pas venir , c’est mieux; Et puis j’ai mes petites habitudes, tu sais. Bon je vais raccrocher. Si tu viens, dis moi quand, comme ça je serai là. Allez bonne nuit !
— Non, attends…
— Quoi ? tu as encore quelque chose à me dire ?
— Je te dis qu’on va venir te voir bientôt
— Me voir bientôt ? mais pour quoi faire ? tu es encore jeune ! et puis, c’est qui ça on ? tu as une petite amie ?
(silence)
— ça fait longtemps qu’on ne s’est plus vus, je vais venir avec Madeleine et Tristan. Il a bien grandi depuis la dernière fois. S’il te plait, sois gentille avec Madeleine quand tu la verras.
— Non, je ne crois pas que ce soit une bonne idée. Bonne nuit, Damien. Prends bien soin de toi.
— Oui maman. A bientôt. bonne nuit.
Hôpital Saint Jean - bloc opératoire - une nuit de janvier
— son coeur repart, c’est bon, on le tient, comment vont la femme et le petit ?
— Ils sont sortis d’affaire, on était à deux doigts de les perdre eux aussi et puis les constantes se sont stabilisées tout à coup.
— Un vrai miracle. C‘était probablement pas encore leur heure. Personne ne les attendait de l’autre côté sans doute.
— Arrête avec ces foutaises. Allez, je le monte en réanimation, vas te reposer en attendant le prochain arrivage. La nuit n’est pas finie et la météo est pourrie.
***FIN***
Laurence Legrand
@crédit photo : meltsovv sur Pixabay
Reste, personne ne t'attend